Célébrations , Homélies et MéditationsVie de la paroisse Notre Dame des Anges

Chemin de Croix du Vendredi Saint à Notre Dame des Anges

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Chemin de croix 2024

Le 1er Chemin de croix a lieu au 4ème siècle à Jérusalem. On remémore le chemin de la Passion du Christ Jésus sur la « Via dolorosa ». Il s’agit de se préparer à entrer dans le Vendredi Saint célébré en le vivant. C’est aujourd’hui, dans notre monde et ce qui le traverse ici et là. Il nous fait faire les pas de Jésus dans sa Passion. Nous évoquerons l’événement, nous le relierons à une brève Parole des Écritures, puis une prière conclura. L’un ou l’autre pourra déposer une intention pour un pays, une personne, lié à l’actualité. Nous faisons silence et un refrain marquera la fin d’une station.

I – Jésus est condamné à mort

Hier la foule t’acclamait. Aujourd’hui elle est retournée par les puissants et réclame ta mort.

« Pilate dit aux Juifs : ’Voici votre roi’. Mais ils se mirent à crier : ‘A mort ! A mort ! Crucifie-le !’ Alors il leur livra Jésus pour qu’il soit crucifié. »

Seigneur, tu as porté notre péché. Prends pitié sur terre des innocents condamnés. (silence)

Donne-nous S un cœur nouveau. Mets en nous S un esprit nouveau.

II – Jésus est chargé de sa croix

La croix est l’instrument de mort des grands malfaiteurs. En certains pays on n’hésite pas à écarter les gêneurs par tous les moyens. La croix des Romains, c’est lourd. Jésus, acclamé hier sur un âne, se laisse regarder comme un bandit. Il prend sa croix.

« Ils se saisirent donc de Jésus. Portant lui-même sa croix, Jésus sortit ».

Seigneur tu portes nos péchés. Tu as prié pour tes bourreaux : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Nous te prions pour nos frères et sœurs qui ploient sous le poids de leurs croix. (silence)

Ô Seigneur sauve-nous, ô Seigneur guéris-nous, donne-nous ta paix.

III – Jésus tombe une première fois

Il tombe. Jésus qui tombe, c’est Pierre qui va chuter, c’est nous qui errons. Il est à bout de souffle, il ne tient plus. Comme certaines personnes âgées quand elles sont fragiles, au bout du rouleau.

« Le souffle en moi s’épuise, je me redis toutes tes actions, je tends les mains vers toi, me voici devant toi comme une terre assoiffée ; vite réponds-moi Seigneur, je suis à bout de souffle ». (Psaume 142)

Seigneur tu chutes, comme nous chutons parfois gravement sous le poids de nos blessures ou celui de nos errances. Viens en aide à nos regards plus prêts à accuser qu’à relever. (silence)

A qui irions-nous Seigneur ? Tu as les paroles de la vie éternelle.

IV – Jésus rencontre sa mère

Une mère qui assiste impuissante à l’agonie de son enfant, c’est un calvaire. Elle avait chanté : « il renverse les puissants de leur trône, il élève les humbles ». Peut-elle encore le croire ? C’est l’heure de la nuit. C’est l’heure des ténèbres. Nous voici devant la mère des Hommes, une mère laminée par notre nuit.

«Or, près de la croix de Jésus se tenait sa mère, Avec la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie-Madeleine. »

Jésus, que nous sachions rencontrer ce regard de Marie, ta mère, sur ton chemin de croix. Et qu’avec elle nous tenions jusqu’à la consolation et la force nécessaire pour continuer la route. (silence)

Seigneur, ne nous traite pas selon nos péchés. Seigneur ne nous juge pas selon nos offenses ! Que descende sur nous ta miséricorde.

V – Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix

Simon de Cyrène vient peut-être de la Libye. Il se serait retrouvé là par hasard, réquisitionné par les soldats romains. Il s’en souviendra toute sa vie. Une association porte son nom aujourd’hui, qui regroupe valides et handicapés sous un même toit. Savons-nous reconnaître dans le monde, avec Simon de Cyrène, l’appel du Dieu souffrant : « Simon, j’ai besoin de toi » ?

« Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène qui venait de la campagne et ils le chargèrent de la croix pour la porter derrière Jésus. »

Jésus, accorde-nous la grâce de trouver encore assez de disponibilité pour marcher avec celles et ceux qui peinent sous leurs croix. (silence)

Sur les chemins de la vie. Sois ma lumière Seigneur.  

VI – Véronique essuie le visage de Jésus

Elle n’est pas évoquée dans l’évangile. Sur les chemins désolés elle est cette « grâce qui suffit », tendresse venue nul ne sait d’où, qui réconforte les corps meurtris sur la terre. Véronique, « véritable icône » du Christ.

« Il n’avait ni beauté ni éclat pour attirer nos regards, ni prestance pour nous séduire. Il était méprisé et délaissé par les hommes. Homme de douleurs, familier de la souffrance. Comme quelqu’un devant qui on détourne le visage. » (Is 53, 2-3).

Que ce chemin de croix soit aussi pour nous un chemin d’espérance, d’engagement pour que les sœurs et frères du Ressuscité connaissent la résurrection d’un nouveau commencement, sans esclavage ni servitude. (silence)

Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté.

VII – Jésus tombe pour la 2ème fois

Les rechutes sont rarement encourageantes. Rechute dans la maladie, rechute dans le boulot, rechute après la sortie de prison ou une première migration. Jésus les porte, les vit. L’horizon se resserre. Pourtant il se remet debout, il puise encore une force dans l’extrême faiblesse.

« Or, ce sont nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérions comme un lépreux. Frappé par Dieu et humilié ! Mais lui, il a été châtié à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes. Le châtiment qui nous rend la paix est tombé sur lui. Dans ses blessures nous sommes guéris ! » (Is 53, 3-4)

Nous te prions Seigneur. Pour les découragés de la vie. Pour nos frères et sœurs en panne d’énergie devant la difficulté qui redouble. Toi qui t’es relevé une 2ème fois, donne-leur, donne-nous le courage de nous relever. (silence)

Donne-nous S un cœur nouveau, mets-en nous S un esprit nouveau.

VIII – Jésus s’adresse aux femmes de Jérusalem

C’est le monde à l’envers : c’est lui le condamné, le supplicié, qui va consoler ces femmes en désarroi ! Il leur rend leur visage et leur dignité du fond de son épuisement, lui qui bientôt ne sera plus.

« Le peuple, en grande foule, le suivait, ainsi que des femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur Jésus. Il se retourna et leur dit : ‘Femmes de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants ! » (Lc 23, 27-28)

Nous te prions, Seigneur, pour les écrasés par le chagrin. Pour nos amertumes quand nous nous y enfermons et qu’alors nous ne portons plus rien ni personne, pardonne-nous, Jésus. Que nous marchions en ta consolation qui traverse la croix. (silence)

Dieu de tendresse et Dieu de pitié, Dieu plein d’amour et de fidélité ; Dieu qui pardonnes à ceux qui t’aiment et qui gardent ta parole.

IX – Jésus tombe pour la troisième fois

En quelques heures Jésus porte tous les fardeaux de notre humanité. Deux fois ça passe, trois fois, ça casse. Les forces lâchent, et pas seulement physiques. Les amis les plus fiables, les appuis, tous s’en vont, tout nous lâche, c’est l’heure du long tunnel obscur. Le sens de la vie a fui.

« Si le grain de blé ne tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, Il donne beaucoup de fruit. » (Jn 12, 24)

Pour les abandonnés de la terre, Seigneur. Pour celles et ceux qui se sentent seuls, anéantis, rejetés de partout, peuples délaissés, migrants, détenus, personnes âgées … Nous voulons nous souvenir que pour nous tu t’es relevé une 3ème fois. (silence)

Oui, je me lèverai, et j’irai vers mon Père.

X – Jésus est dépouillé de ses vêtements

Déshabiller une personne, et en public plus encore, c’est humiliant. C’est être rendu à l’état d’objet. Objet de regards, de convoitises peut-être, de dérision. Nu Jésus est venu sur de la paille, nu il quitte le monde sur le bois des maudits.

« Ils prirent ses vêtements et firent quatre parts, une part pour chaque soldat, et la tunique. » (Jn 19, 23) … « Je suis un ver, non plus un homme, raillé par les gens, rejeté par le peuple ». (Ps 21, 7)

Nous te prions, Seigneur. Pour les humiliés de la planète. Pour les personnes violentées, traumatisées, même en ton Église. Quand la tendresse s’en va et ne laisse plus voix qu’à la violence et à l’emprise, Jésus, prends pitié. (silence)

A qui irions-nous Seigneur ? Tu as les paroles de la vie éternelle.

XI – Jésus est cloué sur la croix

L’issue s’est figée. Les pieds qui ont marché et porté une bonne nouvelle sont bloqués, comme ces mains qui ont tant consolé et relevé, appelé, aimé. Ils ont cloué le ciel, et la terre n’a pas dit un mot. Le Fils de l’Homme est élevé …

« Lorsqu’ils furent arrivés au lieu appelé Crâne, ils l’y crucifièrent, ainsi que les malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche. Et Jésus disait : « Père pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23, 33-34)

Seigneur nous te prions. Pour les agneaux qu’on mène à l’abattoir et qui n’ouvrent pas la bouche, sur la terre. Pour celles et ceux que l’injustice vient rabaisser et crucifier sans même pouvoir réagir. Pour nos frères et sœurs dans une impasse, abandonnés (silence)

Pitié Seigneur, car nous avons péché.

XII –  Jésus meurt sur la croix

Entre 2 bandits sort un cri : « mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Pourquoi tant de haine chez les hommes ? Et tant de silence chez Dieu ? Le ciel s’obscurcit. Un souffle crie et s’épuise. Puis c’est le grand silence.

« C’était déjà environ la sixième heure (midi) ; l’obscurité se fit sur toute la terre jusqu’à la neuvième heure, car le soleil s’était caché. Le rideau du Sanctuaire se déchira par le milieu. Alors, Jésus poussa un grand cri : ‘Père, entre tes mains je remets mon esprit’. Et après avoir dit cela, il expira. »

Nous prions en silence.

Seigneur, ne nous traite pas selon nos péchés, Seigneur, ne nous juge pas selon nos offenses ; que descende sur nous ta miséricorde !

XIII –  Jésus est descendu de la croix

Le corps de Jésus descendu de la croix est remis à sa mère, Marie. Deux hommes craintifs s’approchent : Joseph d’Arimathie et Nicodème. L’un a osé aller voir Pilate, l’autre est là, la nuit mais il est là. Il ne reste plus derrière que le bois de la croix, signe de bras étendus qui offrent l’Amour et le Pardon de Dieu à la terre.

« Après cela, Joseph d’Arimathie, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des Juifs, demanda à Pilate de pouvoir enlever le corps de Jésus. Et Pilate le permit. Joseph vint donc enlever le corps de Jésus. Nicodème – celui qui, au début, était venu trouver Jésus pendant la nuit – vint lui aussi ; il apportait un mélange de myrrhe et d’aloès pesant environ cent livres. » (Jn 19, 38-39)

Nous te prions, Seigneur. Pour tous les maltraités, les rejetés, les écartés de la vie humaine. Aide-nous, en eux, à accueillir la croix qui appelle à l’amour et au pardon les uns des autres. (silence)

Ouvre mes yeux Seigneur aux merveilles de ton amour. Je suis l’aveugle sur le chemin, guéris-moi, je veux te voir.

XIV – Jésus est mis au tombeau

Derniers gestes, il faut se hâter car le sabbat approche. Embaumer le corps, l’entourer d’un suaire et d’un linceul, le déposer au tombeau, rouler la pierre. Puis vient un silence bruyant. Les souvenirs émergent et se mélangent. Peut-être aussi ces mots qui reviennent, quand il évoquait le Fils de l’Homme qui allait souffrir, être rejeté et tué, et trois jours après, ressusciter ». L’absence devient attente, toute petite mais qui sait ? Ce ne serait pas la fin ? …

« Les femmes qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée suivirent Joseph : elles regardèrent le tombeau et comment son corps avait été mis. Puis elles s’en retournèrent et préparèrent aromates et parfums. Et durant le sabbat elles se tinrent en repos selon le précepte. » (Lc 23, 55-56)

Nous te prions, Seigneur. Pour celles et ceux qui cheminent et meurent sans espérance, sans espoir d’un avenir. Apprends-nous le goût des petites lueurs. Oui, apprends-nous le goût de Pâques quand nous baissons les bras, submergés par la nuit. (silence) … Au terme du chemin, si je le veux, je peux déposer un prénom, un nom, un pays, un peuple, pour le confier à la miséricorde du Seigneur (…)

Pain rompu pour un monde nouveau, gloire à toi, Jésus Christ ! Pain de Dieu, viens ouvrir nos tombeaux, fais-nous vivre de l’Esprit.

Homélie

« Je suis venu pour rendre témoignage à la vérité ». La Passion fait contempler la traversée du combat unique de la Vérité face au Mensonge. Dans ce combat personne n’est maître de rien, sauf le Fils de l’Homme. Au mieux j’accompagne le Christ. Les agissants sont tous pris par le Mensonge. Marie, des femmes, le disciple que Jésus aimait et quelques autres demeurent là, transpercés. C’est leur seule « action ». Tout leur échappe. Un calvaire se livre.

L’Esprit pousse le Fils au désert des ténèbres : « Qui cherchez-vous ? », « c’est moi ». Il ne se dérobe pas : « pourquoi m’interroges-tu ? Pourquoi me frappes-tu ? » Il invite à relire ce qui anime ma parole, mes gestes. Beaucoup s’affairent à être en règle pour la pâque, et personne ne voit que Dieu arrêté, humilié, meurtri, vit une Pâque nouvelle, la traversée du Mensonge. La Vérité, réduite au silence, défigurée, éprouve nos ténèbres. Au bout de la nuit, il remet l’Esprit. Un jardin reçoit l’Arbre de Vie. Dieu abaissé se tait …

par Olivier de Framond sj