Le mardi 17 novembre, Lc 19, 1-10, par Florian CAZENAVE s.j.
Le mardi 17 novembre, Lc 19, 1-10, par Florian CAZENAVE s.j.
Debout!!!
« Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison » annonce Jésus dans cet Évangile.
Il y a beaucoup de joie, dans cette rencontre entre le Christ et Zachée. Une transformation advient. Mais est-ce que l’on parlerait de salut, si le Christ ne le mentionnait pas ? On pourrait parler de conversion et de transformation. Mais qu’est-ce qui permet de parler de salut ? Et, en fait, qu’est-ce que le salut ?
Je ne vous promets pas de répondre à cette question. Il parait qu’un vieux jésuite disait en homélie, peu de temps avant sa mort et après des années de pastorale, qu’il ne savait pas dire ce qu’était le salut. Alors nous n’allons pas faire mieux ici. Nous allons seulement nous mettre à l’écoute de cet Évangile, aujourd’hui, dans la confiance que l’on sera au moins un peu éclairé.
Je vous propose trois temps :
- Zachée est « chef des publicains » – cela nous campe le personnage !
- « Il cherchait à voir Jésus »
- « Debout » !
Zachée est « Chef des publicains ». Il est donc un notable, un homme éminent : en plus il est très riche. Un mot cependant sur les publicains, car il nous faut bien appréhender ce personnage pour aller plus avant.
Car, à Zachée, une chose lui manque certainement : c’est que les publicains n’étaient pas bien intégrés dans la société d’alors. On le voit bien ici par la manière dont il est désigné par les autres : il est un « homme pécheur » !
C’est que les publicains sont des collecteurs d’impôts, au service des romains qui occupaient la Palestine d’alors. Ils sont perçus comme des alliés des romains. Ils dont du prêt usurier et pratiquent des taux qui peuvent s’approcher des 45% ! Imaginez un peu ! Ainsi, ils étaient mal vus et peu appréciés, mais ils ont pourtant beaucoup de pouvoir et ont, pour ainsi dire, réussi socialement.
Jésus les mentionne à plusieurs reprises dans ses paraboles, et pour rabattre le caquet à ceux qui se drapent trop dans leurs pratiques religieuses, il donne les publicains en exemple, dans un autre passage de l’Évangile : « Les publicains et les prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu ».
Ainsi, nous pouvons bien imaginer comment un tel homme est à la fois homme de pouvoir et homme dont les relations avec les autres, et avec le reste de la société, sont difficiles.
Mais voilà, en dépit de tout son pouvoir, en dépit de toutes ses richesses, Zachée exprime un grand désir : il « cherchait à voir Jésus ». A quoi voit-on que son désir est grand ? C’est qu’il trouve les moyens de surmonter les obstacles. Au nombre de deux, apparemment, ici : la foule, et sa petite taille.
Cependant, j’en ajouterai un troisième. Le pouvoir et l’avoir font un personnage digne. Et c’est cette dignité de notable qu’il met un peu derrière lui pour monter sur un arbre, un peu comme le ferait un enfant ?
Alors, qu’a donc entendu Zachée sur Jésus pour qu’il veuille ainsi le connaître ? Comment se fait-il que ce désir soit si grand ? Ce désir, c’est le premier pas d’un homme vers Jésus – et c’est la perche que celui-ci va saisir pour y répondre.
« Zachée, aujourd’hui il me faut demeurer chez toi ».
Jésus fait merveille avec le peu que nous lui donnons.
Il y a une démesure dans la réponse du Christ, dans sa parole.
Au petit geste de Zachée répond un geste inattendu : Jésus s’invite chez lui. Un geste qui dépasse l’attente. Le grand désir n’est pas comblé, il est dépassé !
Non seulement Zachée peut « voir » Jésus, mais il le « rencontre » et « l’invite » chez lui.
Avez-vous remarqué ce petit terme utilisé pour désigner Zachée après sa rencontre avec Jésus ? « Debout ».
Cette rencontre produit une transformation chez Zachée : et le voici à présent « debout », nous dit le texte.
« Debout », c’est la posture de l’homme ressuscité, de l’homme « remis debout », « remis à lui-même ». Il ne tient plus debout de manière penchée, en s’appuyant sur ses biens, sur son pouvoir ou sur sa dignité, mais il tient debout depuis l’intérieur de lui-même.
C’est ainsi, à mon avis, pour ce texte, que l’on peut dire que le salut lui a été donné. Et l’un des signes de ce salut, ici, c’est qu’il se communique et se propage : Zachée donne à son tour de ses biens, pour réparer les torts commis, mais aussi pour prendre soin de ceux qui n’ont pas.
Un salut reçu, qui sauve d’autres.
Nous aussi, demandons cette grâce d’un grand désir de « voir » le Christ, pour que nous puissions le rencontrer, pour qu’il y réponde en dépassant nos attentes. Nous aussi laissons le salut que nous recevons se communiquer à d’autres, en usant de tout ce que nous sommes, de nos paroles, de nos gestes et de nos biens pour cela.
Nous qui désirons aussi « voir » Jésus, voici quelques pistes pour nous accompagner dans la rencontre avec lui, dans la prière.
Nous pouvons prendre le temps de méditer les différentes étapes de cet Évangile en considérant sur ce grand désir de « voir » le Christ, sur cette rencontre inattendue et sur les fruits qu’elle a produit dans la vie de Zachée.
Nous pouvons aussi nous souvenir d’une rencontre gratuite qui nous a causé de la joie et qui a aidé à transformer notre vie. Dans quelle mesure cette rencontre nous parle-t-elle du Christ et de son salut ?
Est-ce que notre relation au Christ, dans l’Église, est quelque chose qui nous met davantage « debout », dans cette posture de ressuscité ? Ou avons-nous vu cette « remise debout » à l’œuvre chez d’autres ? Rendons grâce pour cela, et demandons que nous laissions bien le salut qui nous est donné se communiquer à d’autres.